L'ÉQUIPE, 06.12.1995

Alain Prost: "Ma seconde carrière"


LA QUADRUPLE CHAMPION DU MONDE EST DEPUIS HIER CONSEILLER TECHNIQUE DE MCLAREN-MERCEDES. IL S'OCCUPERA AUSSI DU MANAGEMENT DES PILOTES ET PRENDRA LE VOLANT EN ESSAIS. IL NOUS PARLE POUR LA PREMIERE FOIS DE SON NOUVEAU METIER.

SURPRISE! "IL" EST LA, EN CHAIR ET EN OS. ARRIVE TOUT DROIT D'ANGLETERRE, ALAIN PROST S'EST POSE HIER A GIBRALTAR ET S'EST RENDU SUR LE CIRCUIT DE JEREZ, OU SE TROUVE ACTUELLEMENT L'ECURIE MCLAREN. SA NOUVELLE ECURIE DESORMAIS. DANS LAQUELLE IL A UN ROLE INEDIT: MEME S'IL REPRENDRA, PARFOIS, LE VOLANT D'UNE F1 - IL LE FERA A COUP SUR EN JANVIER OU FEVRIER PROCHAINS POUR ESSAYER LA MP 4/11 -, ALAIN PROST VIENT, PLUS ENCORE QUE FIN 1993, DE QUITTER SA PEAU DE PILOTE. IL PREND DE LA HAUTEUR. ABORDE SA VERITABLE RECONVERSION. DEBUTE, IL LE DIT LUI-MEME, "UNE SECONDE CARRIERE".

ALAIN, VOUS VOICI INTEGRE OFFICIELLEMENT A LA MCLAREN, AVEC UN NOUVEAU ROLE. QUEL EST-IL EXACTEMENT ET COMMENT CELA S'EST-IL DECIDE?
Ça fait longtemps que c'était en discussion, il ne restait que des petits détails à régler. C'était bien de prendre le temps de voir comment cela pouvait se passer, prendre aussi l'avis des gens de l'équipe. Mais ça, ce sont des détails... Le rôle, il est comprlètement nouveau en Formule 1, dans la mesure où je suis à part entière dans le groupe technique, qui est, chez McLaren, au sommet de la hiérarchie. Et quand le besoin s'en fera sentir, je conduirai aussi la voiture. Non pas pour etre comme un pilote d'essais mais pour avoir, ensuite, la possibilité de parler avec les pilotes en sachant comment elle se comporte; pour savoir, quand ils disent quelque chose, ce que cela représente. J'aurai ainsi les deux casquettes. Enfin, j'aurai un rôle important au niveau du "developpement", de la méthode de travail des pilotes. Ils sont tout de même assez jeunes, avec peu d'experience. Je suis d'ailleurs ravi de travailler avec David Coulthard, que j'aime beaucoup.

EN QUOI LES JOURNEES PASSEES A CONDUIRE LA MCLAREN A SILVERSTONE CET ETE ONT INFLUENCE VOTRE CHOIX? C'EST LA QUE VOUS AVEZ DECIDE DE NE PLUS PILOTER?
J'ai fait, dès le départ, ces essais dans le but d'évaluer la voiture et étudier les moyens de m'integrér à l'équipe... Il n'était pas question pour moi, d'être... euh... un nouveau Niki Lauda. Je voulais être sûr que ce travail me plaise, soit utile à tout le monde, soit positif, concret bien entendu. A ce moment-là, on a parlé de course dès que je suis monté dans la voiture mais moi, j'avais franchi le cap. Mais c'est difficile pour un ancien pilote d'avoir une position établie, claire et définie dans une équipe en ayant des responsabilités évidentes... En tout cas, je suis ravi. C'est une seconde carrière.

C'EST LA VRAIE SECONDE CARRIERE A LAQUELLE VOUS ASPIRIEZ OU AURIEZ-VOUS TOUTE DE MEME PREFERE BATIR VOTRE EQURIE?
A la limite, j'aurais eu le même rôle... mais dans mon équipe. Cela n'a pas éte possible...

MAIS CE ROLE, N'EST-IL PAS UN PEU DELICAT? N'AUREZ-VOUS PAS TENDANCE A TOMBER DANS LE PIEGE DE L'ANCIEN, EN VOULANT QUE LES PILOTES UTILISENT LES REGLAGES QUE VOUS AURIEZ SOUHAITE PRENDRE?
Non, non... C'est une question d'intelligence, de prendre de la hauteur... Et si c'était ça, je pense que cela ne marcherait pas! En revanche, au niveau de la manière de travailler, d'une certaine systématique et de la façon de donner les informations à l'ingenieur pour progresser, je sais comment ça marche. Dans la vie, tout le monde a des qualités et des défauts mais il faut évoluer... Je sais, par exemple, quels étaient mes défauts quand je courrais. A moi de leur faire profiter de mes qualités tout en leur faisant éviter mes défauts...

VOUS EVOQUIEZ VOTRE PARTICIPATION A LA "FABRICATION" DE LA MP 4/11. DANS QUELS DOMAINES POUVEZ-VOUS APPORTER QUELQUE CHOSE?
Dans plusieurs... Depuis très longtemps, ce n'est plus une seule personne qui construit une F1, mais un groupe. Que ce soit sur le châssis, le moteur, l'aérodynamique, mon experience, mes connaissances, les idées que je peux avoir sont bénéfiques. Et puis, je m'occuperai de tout le suivi de tout le travail jusqu'aux essais. Il y a ensuite le développement, mais là, c'est autre chose.

PEUT ON ALORS DIRE QUE VOUS SEREZ UNE SORTE DE COORDINATEUR, UN PEU LE CIMENT ENTRE LE BUREAU D'ETUDES ET LES PILOTES?
Oui, c'est un peu ça...

C'EST ENORME!
C'est un gros boulot! Avec une grande responsabilité, mais c'est hyper intéressant, hyper motivant. Pas évident aussi, car on part d'un peu loin...

AVEZ-VOUS DES CRAINTES?
Sincèrement, non. Sur le plan interne, je n'en ai même pas du tout. Il y a des gens chez McLaren que je connais depuis quinze ans qui n'avaient qu'une envie, c'était de retravailler, d'une manière ou d'une autre, avec moi... Mais à l'extérieur, comment ça va être perçu? En F1, les gens aiment bien caricaturer.

ALLEZ-VOUS SUIVRE TOUS LES GRANDS PRIX?
Je serai, c'est sûr, sur toutes les séances d'essais. Là, c'est la première: je suis venu comme observateur, pour nouer les contacts et les liens avec David. C'était important d'assister à ses débuts sur la McLaren. Ensuite, c'est déjà certain que J'irai voir les trois premières courses. Puis, en fonction des événements, nous déciderons ensemble à quelle course c'est bien que j'assiste. Peut-être que ce sera à toutes, peut-être que ce sera à quelques-unes. Mon rôle est vraiment plus d'être à l'usine et suivre les essais privés et le développement. Je serai quand même assez souvent sur les courses...

C'EST UN CONTRAT A DUREE DETERMINEE, VOUS VOUS ETES FIXE DES ECHEANCES AVEC MCLAREN?
C'est un accord annuel, j'espère... il faut penser que cela durera très longtemps.

A TERME, PEUT-ON Y VOIR UN MOYEN DE REUISSIR AVEC MCLAREN CE QUE VOUS N'ETES PAS PARVENU A REUSSIR AVEC VOTRE PROPRE ECURIE ET DEVENIR, POURQUOI PAS, LE DIRECTEUR DE L'ECURIE MCLAREN?
Je crois que, comme en dit, à chaque jour suffit sa peine. Les bonnes choses arrivent toutes seules et c'est uniquement grâce à son travail, à ses qualités et à sa motivation que l'on arrive à ce genre de situation... si ça arrive... pour l'instant, je ne sais pas du tout. L'idée de ma propre équipe était un challenge complètement different. Et ce n'est pas parce que je ne l'ai pas reussi que je fais ça. Une de mes motivations, quand j'essayais de la monter, était justement de pouvoir travailler, d'apporter mon expérience. Ce travail d'équipe, ce travail d'hiver, ce travail d'essais m'ont toujous plu. A la limite, les courses, par certains aspects, me déplaisent presque. Donc, je fais vraiment ce que j'avais envie de faire. Ici, chez McLaren, c'est pratiquement comme dans ma propre structure. Je suis arrivé à ce que voulais. Après, on verra...

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Patrick RIVET à Jerez
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