SPORT365.FR, 30.06.2007

Alain Prost : « On s’achemine vers une lutte à deux »



Interview: Jean-Moise DUBOURG

A l’approche du Grand Prix de France, comme avant chaque course, Alain Prost nous livre son analyse. Après le succès d’Hamilton aux USA, le quadruple champion du monde voit la saison se résumer à un duel entre les deux pilotes McLaren.

Alonso avait le regard très noir à l’arrivée du Grand Prix des USA après la victoire d’Hamilton. Est-il en train de prendre conscience que la bataille pour le titre se jouera entre lui et son coéquipier alors que les Ferrari semblent un peu en retrait désormais?
On arrive dans la deuxième phase du Championnat avant une troisième, en fin de saison, où l’aspect psychologique sera déterminant. Là, ils ne sont plus que deux protagonistes pour le titre. C’est ce qui fait la différence par rapport au début de saison où les Ferrari de Massa et Raikkonen étaient dans le coup. On pensait que ça allait être une lutte à quatre mais aujourd’hui, on s’achemine vers une lutte à deux. Ce qui fait que la situation psychologique des deux pilotes dans l’équipe, notamment celle d’Alonso, est encore plus fragile parce qu’on ne parle plus que de ce duel. Tout se concentre sur Hamilton et Alonso et c’est de plus en plus difficile pour Alonso. Ce n’est pas une très bonne nouvelle pour lui.

Pourquoi l’écart se creuse-t-il à ce moment là de la saison entre les McLaren et les Ferrari?
L’écart technique se creuse. Mais je pense qu’il est relativement faible. On l’a d’ailleurs vu à Indianapolis où les Ferrari étaient un poil plus vite en fin de course. Il y a un écart qui s’est creusé depuis trois ou quatre Grands Prix et maintenant, la question est de savoir si cet écart va encore augmenter ou stagner. Au contraire des années précédentes, les pneus étant maintenant identiques, on s’aperçoit que quand une voiture domine, même d’un ou deux dixième au tour, elle est difficilement « rejoignable ». Ferrari doit donc continuer les développements aérodynamiques ou mécaniques. Après, les performances des pilotes comptent aussi. Alonso et Hamilton sont au dessus. Ils se bagarrent tous les deux, ils ont motivé et transcendé l’équipe toute entière. De l’autre côté, on sent un petit flottement chez Ferrari. Massa n’est pas un vrai leader. C’est un super pilote et on savait très bien qu’il serait au niveau de Raikkonen. Mais il n’y a pas cette dynamique présente chez McLaren.

Est-ce que Michael Schumacher, toujours conseiller au sein de la Scuderia, pourrait arranger les choses?
Je ne pense pas que sa présence soit bénéfique. Sans enlever les qualités de Michael au niveau de la connaissance de l’équipe et sur le plan humain, je ne crois pas qu’ils aient besoin de ça. Ils ont surtout besoin que Massa et Raikkonen se tirent la bourre et soient très performants tous les deux. Pour ramener une nouvelle dynamique. Je ne pense pas que ce soit quelqu’un d’extérieur à l’équipe qui puisse ramener cet état d’esprit.

Pour son Grand Prix national à Magny-Cours ce week-end, est-ce que Renault peut rêver à un podium après deux bonnes courses au Canada et aux Etats-Unis?
Je pense que Renault est en train de vivre une saison de transition. Ils n’ont peut-être pas bien appréhendé les nouveaux règlements ou le passage aux pneus Bridgestone. Il faut qu’ils se reconstruisent eux aussi. Le Grand Prix de France peut servir de déclencheur. Ils doivent continuer leur progression actuelle pour arriver dans la deuxième partie de saison en étant plus compétitif afin de penser déjà à 2008.

Un pronostic pour le Grand Prix de France?
L’avantage devrait, normalement, encore revenir à McLaren. Ferrari a toujours été très bien à Magny-Cours mais ils étaient aussi très bien à Indianapolis et ils ont été battus… Je ne vois pas de grande surprise si ce n’est peut-être Renault qui pourrait se mêler d’un peu plus près à la lutte parce qu’ils ont une très grande expérience de ce circuit. Et outre l’aspect sportif, c’est peut-être le dernier Grand Prix à Magny-Cours…

Si la F1 s’en va de Magny-Cours, quel sera l’avenir de la discipline en France?
Il est compliqué depuis déjà plusieurs années. Il faudrait lancer une nouvelle dynamique mais ce n’est pas facile. Renault est une écurie très internationale donc le côté franco-français autour du constructeur est un peu moins important. En ce qui concerne Magny-Cours, les investissements de ces dernières années n’ont certainement pas été faits là où il fallait (les accès, l’hôtellerie ou la logistique). Il faudrait tout remettre à plat et qu’il y ait une vraie décision gouvernementale pour redynamiser la course auto et l’automobile en général en France. J’élargis le débat parce qu’on est devenu un pays un peu « autophobe » et ce n’est pas facile de parler de ça aujourd’hui eu niveau de la F1.



Back to interview-page!

Alain Prost-Infopage

prostfan.com

prostfan.com © by Oskar Schuler, Switzerland