LE JOURNAL DU DIMANCHE, 17.05.2009

Prost: "Un problème politique"


________________________________

Propos recueillis par Stéphane JOBY
Le Journal du Dimanche
________________________________

Alain Prost - 199 GP comme pilote, 83 comme patron d'écurie - espère toujours en vivre un comme "organisateur", aux côtés de Lagardère Sport, candidat à la promotion du GP de France qu'il conseille. Alors que Jean-Louis Borloo et Chantal Jouanno expriment depuis un mois leur opposition à un circuit de F1 à Flins-Les Mureaux (Yvelines), le quadruple champion du monde tire le signal d'alarme.

Comprenez-vous les prises de position répétées de Borloo et de Jouanno contre le circuit?
Non. Il y a un projet bien ficelé. Je conseille le groupe Lagardère, qui est prêt à être le promoteur de l'événement. Si on défend le dossier, c'est qu'on estime qu'il est abouti, que Pierre Bédier et le conseil général des Yvelines d'un côté, Jean-Michel Wilmotte et les architectes de l'autre ont bien travaillé. Les problèmes de nappe phréatique et de capteurs d'eaux sont connus depuis longtemps. Des investissements très lourds sont d'ailleurs prévus pour y remédier. Le projet prend largement en compte l'environnement. Une enquête publique est en cours. Attendons les conclusions avant de taper sur le projet. Il faut regarder les choses précisément, aller au fond du dossier et recevoir ses acteurs avant de critiquer. J'aimerais surtout que ce ne soit pas une posture politique mais plutôt un discours rationnel et logique.

François Fillon et Bernard Laporte soutiennent le projet Flins. Quelle est la position officielle du gouvernement?
C'est un projet national. Mais il y a un problème politique, ou de discours politique, qu'on ne peut pas régler. Il faut que les choses soient claires au niveau du gouvernement.

Un Grand Prix de France en 2011 est-il toujours possible?
Si une procédure de débat public est engagée, cela sera sans doute compliqué.

A part Flins, y a-t-il une solution de repli?
La seule alternative, c'est Magny-Cours. Mais ce n'est pas compatible avec les budgets et les envies de Bernie Ecclestone et des constructeurs. Les autres circuits existants ne sont pas adaptés à la F1 d'aujourd'hui.

Ecclestone ne va-t-il pas finir par se lasser?
Trois ans sans Grand Prix en France, cela peut faire beaucoup en effet. Il y a de la concurrence pour prendre la place. Mais 2011 ou 2012, cela ne semble pas être un problème pour Ecclestone. On est en négociation avec lui. Ce n'est pas facile car il est actuellement en bataille avec les constructeurs, qui lui réclament une répartition des recettes plus favorable. Il a beau jeu de nous refuser une diminution des versements. La réalité, c'est qu'il y a une crise. Les sommes actuelles ne sont pas réalistes, surtout pour les promoteurs européens, qui doivent pouvoir vivre pour organiser leurs événements sans argent public. Un Grand Prix doit rester une fête populaire. Il n'est pas question de faire payer une place de 300 à 400 euros. Mais l'urgence, pour l'heure, c'est le circuit.

Magny-Cours, Disney, Flins aujourd'hui. Pourquoi le dossier du GP de France est-il si compliqué à finaliser?
En France, on a toujours besoin de la politique. Mais, à force, les jeux politiques deviennent des freins. Chacun a son calendrier. Il y a des élections régionales en 2010, des remaniements toujours possibles. C'est difficile de mettre tout le monde en synergie. On manque de pragmatisme. Il y a une perte de temps et d'énergie incroyable. Et puis il y a des gens qui font beaucoup de bruit sans connaître les dossiers.

Cela peut vous conduire à abandonner?
Je n'ai pas envie de baisser les bras mais c'est difficile d'être en permanence entre deux eaux. On y va, on n'y va pas. C'est typique de la France. Si on considère que c'est un projet important pour l'image de notre pays, pour son industrie automobile, pour l'emploi, allons-y à fond, tout en respectant les procédures évidemment. Un Grand Prix autour de Paris, ce serait aussi fort qu'une Coupe du monde de football. C'est motivant, à condition de sentir qu'il y a une réelle envie, du soutien. Quand on sent des gens toujours négatifs, on peut se poser la question de ce qu'on doit faire...



Back to interview-page!

Alain Prost-Infopage

prostfan.com

prostfan.com © by Oskar Schuler, Switzerland