FRANCE-SOIR, 28.03.1997

PROST - "MISTER BRASIL"


IL Y A REMPORTÉ SIX GRANDS PRIX ET CONQUIS SES FANS LES PLUS CHALEUREUX. IL Y RETOURNE AVEC ÉMOTION.

Au Brésil, il est adoré. Ses six victoires (82-84-85-87-88-90) en ont fait un héros sur une terre qu'on aurait pu croire entièrement dévouée à Ayrton Senna. Toutefois, les Brésiliens ont un cœur immense qu'ils peuvent partager et en ont offert une partie à Alain Prost. Surnommé avec affection "Mister Brasil", le quadruple champion du monde nous raconte l'amour qu'il éprouve pour ce peuple sud-américain.

FRANCE-SOIR: Quand on dit Brésil, quelles images surgissent dans votre mémoire?
ALAIN PROST: Le soleil, la chaleur, l'accueil d'une population, la plage, Rio, les churascarias (restaurants de viande), l'ambiance, et puis... (ému) il y a Ayrton...

L'accueil qu'on vous réservait dans les tribunes du temps de Senna a toujours été surprenant. Les Brésiliens vous adoraient, alors qu'ils avaient le dieu Senna à leurs côtés. Même si vous ne courez plus, ils ne vous ont pas oublié...
Même à l'époque de la pire guerre avec Senna, j'ai toujours eu la vie facile au Brésil, alors que ce n'était pas le cas en Italie ou en France. C'est le seul pays où l'on me réservait un soutien sans faille, c'est vrai. L'ambiance est spéciale, formidable là-bas. Le public est très présent, on ne l'affronte pas sans une certaine appréhension. Il s'extériorise énormément. J'ai gagné six fois le Grand Prix du Brésil, c'est donc un peu chez moi, même si c'était le territoire de Senna... (Soupir). Aujourd'hui encore, je suis très impliqué avec le Brésil. J'ai de fréquents contacts avec la famille d'Ayrton, je suis membre de la fondation créée à Sao Paulo... Je n'oublie pas.

Parmi vos six victoires, quelles sont celles qui vous ont le plus marqué?
1984 tout d'abord. Je venais de quitter Renault, je débutais chez McLaren et j'avais gagné le premier Grand Prix de l'année. Pas mal comme inauguration. J'étais dixième au premier tour après avoir loupé mon départ, je suis remonté et j'ai gagné devant Rosberg et de Angelis. J'avais très mal vécu ma séparation avec Renault. Cette victoire m'a libéré. En 87, je m'étais très très mal qualifié (Il n'était "que" 5e!). Avec John Barnard, nous avons pris un pari de réglages très osés, un pari qui a fonctionné. C'est peut-être l'une de mes plus belles victoires car la course était soudain devenu très tactique, ce que j'aime. Et puis, il y a celle de 90. La première de mes cinq victoires chez Ferrari. On n'oublie pas un tel moment. C'était la deuxième course de la saison, j'arrivais à la Scuderia et j'ai gagné, c'était aussi ma 40e victoire.

Comment expliquez-vous votre extraordinaire réussite dans cette épreuve brésilienne?
Je ne sais pas, peut-être parce que j'aime tout là-bas, la chaleur, le pays, les gens... En général, les courses y étaient tactiques, bizarres, de vrais sprints, avec plein de rebondissements. J'adore le circuit d'Interlagos, à Sao Paulo, où je n'ai gagné qu'une fois, les autres succès ayant été décrochés à Rio de Janeiro. Pour moi, Interlagos est le circuit le plus beau du monde, varié, complet, avec un ensemble de grandes courbes très rapides. Un circuit de challenges, où le pilote se fait plaisir. Très physique aussi, bosselé. La chaleur était épuisante, mais cela m'a toujours plu. Comme à Rio, on y tourne aussi dans le sens inverse des aiguilles d'une montre et les muscles du cou ne sont pas entraînés à ces virages. Celui qui précède la ligne droite des stands est particulièrement éprouvant. Pour ne pas avoir mal, on devait s'attacher la tête... et c'est d'ailleurs ce que je vais conseiller à mon pilote, Nakano, dès vendredi.

On vous sent heureux de retrouver le Brésil dans votre nouveau rôle de chef d'entreprise.
Oui. Nous avons essayé de préparer cette course sur le circuit de Silverstone. Mais ce circuit, qui était bosselé comme Interlagos, a été resurfacé et on n'a pas pu travailler comme on le voulait. J'oscille donc entre l'optimisme car les essais se sont bien déroulés et l'expectative. En ce moment, je partage mon temps entre Magny-Cours, Paris et l'étranger où je noue de nombreux contacts en vue de 1998. Je regrette de ne pas passer plus de temps à l'usine... Je suis immergé totalement dans mon nouveau business, je supervise le quotidien tout en essayant en même temps de préparer l'avenir. C'est loin d'être évident.

Recueilli par Martine CARRET



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