L'ÉQUIPE MAGAZINE, 08.10.1994

Alain Prost: "UNE VOITURE NEUVE, C'EST UN BONHEUR"

Il a remporté 51 Grands Prix, il a été quatre fois champion du monde, il est le consultant et l'ambassadeur de Renault... Ce pilote-symbole est avant tout un amoureux de l'automobile. De toutes les automobiles. Il aime les américaines des sixties, l'Espace, la Bentley décapotable et affirme: "Je n'ai jamais aimé les voitures de sport." Un témoignage souvent surprenant où on apprend, par exemple, qu'Alain Prost préfère depuis longtemps les voitures à boîte automatique.

Qu'y a-t-il dans le coffre de la voiture d'Alain Prost?
Dans le coffre? Dans le coffre, il y a souvent un vélo. Et de temps en temps, mais c'est plus du hasard, un sac de golf. Sinon, il n'y a pas grand-chose. Le coffre sert surtout à transporter les bagages de la maison à l'aéroport.

Vos voitures sont plutôt propres, bien rangées?
Ça dépend... C'est pas le foutoir, en tout cas. Elles ne sont pas toujours très propres extérieurement parce que j'ai souvent la flemme d'aller les faire laver. Laver la voiture moi-même, ça m'est arrivé souvent bien entendu, mais c'était il y a quelques années! Dans Paris, par exemple, je profite souvent d'un restaurant qui fait laver les voitures. C'est pratique, j'essaie toujours de profiter du moindre espace temps, c'est un trait de caractère. Sinon, mes voitures sont plutôt pas mal intérieurement. J'ai horreur des miettes de pain, des chiffons...

Quand vous donnez la voiture à nettoyer, par exemple, on la regarde, on la traite différemment parce que c'est celle d'Alain Prost?
Peut-être... Mais je n'ai pas l'impression qu'elle soit plus soignée. D'ailleurs, à travers ma voiture, comment les gens me voient-ils? D'autant que ça peut être une voiture de location, ou prêtée... Il y a des réactions un peu bizarres, quand j'ai une petite voiture par exemple. Il y a quelque temps, les gens m'imaginaient en Rolls ou en Bentley; alors, quand j'arrivais en Twingo...

Jamais en voiture de sport?
Personnellement, je n'ai jamais aimé les voitures de sport! J'en ai eu pourtant. La première voiture que j'ai achetée quand je courais en 1976 en Formule Renault, c'était une Opel Kadett GTE, avec une boîte courte, un truc vraiment de rallye... C'est d'ailleurs la seule voiture que j'ai plantée. Au bout d'un mois ou deux.

De votre faute
Une connerie! J'étais avec un copain, j'ai tourné dans un chemin en sortant d'une nationale, c'était du verglas, c'est-à-dire des billes de gravillon. On roulait à 40 à l'heure, je me suis pris un arbre. Crashé.

Une première voiture c'est toujours très, très dur...
La première! Je me l'étais offerte grâce à mes primes, tout ça... c'est la seule voiture vraiment sportive que j'ai eue. Après, j'ai eu des Ferrari plus par contrat, à l'époque de Ferrari. Une 348 et une F 40, que j'ai vendue il n'y a pas si longtemps. On dit tout?

Ah! Oui.
Parce que c'est peut-être pas très sympa pour les gens de Ferrari. J'ai fait zéro kilomètre avec la F 40 et une vingtaine avec la 348. Parce que ce n'est pas ce que j'attends d'une voiture. Quand on pilote en F 1, on connaît de telles sensations que conduire une 348 sur la route n'a pas tellement de sens. J'ai eu aussi à l'époque de Renault une R 5 turbo et une R 30. Et je ne me servais que de la R 30! Je l'adorais, elle était confortable, avec un moteur souple...

Vous privilégiez le confort à la vitesse?
Les voitures qu'on dit de sport sont toujours des compromis. Moi, j'ai envie d'une voiture confortable, qui tienne la route si possible, bien que ça n'aille pas toujours de pair, au moins qu'elle ne soit pas traître... Et je suis un adepte de l'automatisation.

Depuis longtemps?
J'ai depuis très longtemps des voitures à boîte automatique. Mis à part la R 30 à l'époque et la Safrane que j'ai en Suisse parce que c'est une quatre-roues-motrices.

Pourquoi ce choix un peu inattendu? Pour le confort de conduite?
La première condition quand je suis à Paris, c'est d'avoir une boîte automatique. Je ne supporterais plus d'être dans les embouteillages avec une boîte mécanique. Ça procure un confort, une avancée aisée, peinard. C'est vraiment ce que j'attends. Et le silence!

Une sorte d'antithèse de ce que vous avez vécu sur les circuits...
Oui, absolument. Mais encore une fois, je suis un peu comme ça depuis le début.

Quelles voitures ont marqué votre enfance, votre adolescence?
Mes parents avaient une DS que j'adorais. Je ne regrette qu'une chose, c'est de ne pas être collectionneur. La preuve, la F 40. Pour être collectionneur, et je comprends très bien qu'on le soit, il faudrait avoir l'emplacement idéal, le circuit... Mais moi, parquer une voiture dans un garage juste pour la voir... J'aime trop la voiture pour la laisser là. Une voiture, il faut qu'elle soit utile.

Vous roulez beaucoup?
De moins en moins. Enfin, pas mal quand même. C'est en Suisse que je roule le plus, car j'habite à 60 bornes de l'aéroport. Les aller-retour ou le trajet jusqu'à Genève, ça va vite. Mais j'ai été un vrai rouleur, quand je faisais du karting, de la Formule 3, même au début de la Formule 1 où je faisais pas mal de déplacements en voiture.

On dirait un coureur cycliste avec ses critériums!
Ça ne me dérangeait pas du tout d'aller en Hollande, en Italie, en Allemagne...

Toujours avec des berlines?
Toujours, oui. Ç:a m'est arrivé une fois, j'étais en F 3, de faire Saint-Chamond-l'Angleterre à quatre dans une R 5 Alpine, aller-retour bien entendu. Je m'en suis souvenu! Mais bon, quand on est jeune, on fait des trucs en voiture qu'on ne fait plus après, c'est clair et net. Rouler toute une nuit sans problème, 1000 à 1200 bornes en déplacement. En karting, de temps en temps, c'est moi qui amenais le Transit. En 1974, j'ai fait Paris-Estoril avec le Transit qui roulait au maximum à 100 à l'heure.

Donc, vous aimez ça.
J'aime toujours ça! Je regrette certains voyages... On perd ce goût du voyage en voiture, ce contact incroyable avec les gens, cette liberté totale... Il y a les contraintes du temps, du travail, la fatigue aussi.

Et les contraintes qui pèsent sur l'automobiliste!
La plus grosse aujourd'hui, c'est les limitations de vitesse. Les gens oublient un peu que c'est à cause du choc pétrolier de 1973-1974 qu'on les a instituées. On pourrait rediscuter la hauteur de ces limitations mais certainement pas le principe en lui-même, c'est trop tard.

Mais fondamentalement, qu'en pensez-vous?
Je suis pour les limitations en ville, vraiment. A condition de les adapter. 50 à certains endroits, c'est vraiment très faible. En ville, j'ai la trouille, avec les piétons, les enfants... Sur autoroute, limiter à 120, 130, avec les voitures d'aujourd'hui, c'est vraiment perturber les gens, faire perdre un temps énorme à ceux qui se déplacent pour leur profession, tout cela pour une sécurité... Je vais vous dire, la concentration est la condition essentielle d'une bonne conduite. Et à 110, 120, de temps en temps, on ne fait pas gaffe, on s'endort un peu.

Alors, quand vous roulez aux États-Unis...
En plus, ils ont amélioré leurs voitures! Avant, 60 miles grosso modo, je trouvais que c'était pratiquement la limite du raisonnable! Ça bougeait, c'était le bateau... C'est un peu l'idéal de la voiture.

Ou un rêve de voiture.
Peu importe la vitesse à laquelle elle va, ce qui compte c'est d'être dedans, avec la radio super, la musique super, la banquette avant où on peut se mettre à quatre, ça crée une convivialité... J'aimais bien la DS aussi à cause de ça.

Vous faites encore des parcours comme ça aux États-Unis?
J'en fais peu mais c'est le seul endroit où j'en fais, où j'ai envie d'en faire. L'année dernière, j'ai fait Phoenix-Los Angeles en voiture, c'était vraiment super, sauf quand il y a un énorme bout droit, il ne se passe plus grand-chose, mais on a le temps de regarder et c'est quand même assez génial. Je regrette vraiment qu'il n'y ait plus de banquette à l'avant dans les voitures actuelles, parce que trois à l'avant quand même... Cet esprit, on l'a perdu, heureusement on le retrouve dans le phénomène Espace!

Vos américaines préférées, ce sont celles des années 60?
Bien sûr, elles sont magnifiques!

Inconduisables aussi...
Ah oui, c'est sûr! Mais moi, ce que j'aime, c'est ça, les cuirs, les chromes... Ah! Une belle anglaise! Quand on pense qu'aujourd'hui, même Mercedes utilise du bois stratifié pour une voiture à 600'000 ou 700'000 francs!

On peut parler de sensualité, d'un rapport corporel avec la voiture?
Exactement. Quand on monte dans ces belles américaines, dans ces anglaises, même certaines récentes... Quand on respire l'odeur du cuir... C'est comme avec une femme, dans ce rapport incroyable qui existe entre deux personnes! Ce bois, ce cuir, c'était complètement différent et on a perdu ça. Je me demande toutefois si on n'y reviendra pas, car l'automobile, on le voit, obéit à des cycles, à des modes.

Aujourd'hui, c'est encore le plaisir qui guide l'achat?
Il y a une vingtaine d'années, on achetait la voiture dont on avait envie, celle qui nous faisait rêver. Aujourd'hui, on achète plutôt celle qui nous est utile. De toute façon, à partir du moment où, avec les limitations de vitesse, on ne peut plus utiliser le potentiel de la voiture, ou en tout cas s'amuser un peu, on ne peut plus faire rêver. Les voitures fonctionnent tellement mieux que dans les années 60, mais c'est un peu de leur charme qui disparaît.

Tout paraît un peu aseptisé. Pourquoi?
Si les modèles se ressemblent, c'est aussi pour des raisons de sécurité. Beaucoup de choses ont été faites dans ce domaine mais il reste beaucoup à faire. Certaines sont d'ailleurs très discutables, même au niveau philosophie. Deux exemples: on va de plus en plus vers l'utilisation de matériaux comme le plastique et vers les petites voitures pour des raisons de coût et peut-être d'encombrement, voire de saturation des grandes villes. Mais sur le plan de la sécurité, est-ce la bonne démarche? Evidemment, quand une petite heurte une grosse... Les milieux autorisés appellent cela un problème d'incompatibilité. Moi, en tout cas, et puisque j'en ai les moyens, je ne veux pas que ma famille roule dans une petite voiture. J'ai peur. Et c'est comme pour les limitations de vitesse: plus on va dans le sens des petites voitures, moins on pourra faire machine arrière. Je crois que l'utilisation des petites voitures, leur taille, mériteraient une réflexion et une réglementation européennes et mondiales.

Vous souvenez-vous du jour de votre permis de conduire?
Très bien. C'était le 16 avril 1973, à Saint-Chamond, et tout s'était très bien passé. Avant, j'avais eu la chance de conduire un peu avec mon père, sans plus, et j'avais pris des leçons comme toute le monde. Mais l'émotion de la première voiture, c'est quand même plus important.

Vous empruntiez la voiture de vos parents?
Oui, j'empruntais la DS. Je suis même allé à l'école avec, deux ou trois fois. Ça n'a pas duré longtemps, c'était ma dernière année d'école. C'était extraordinaire. En même temps, ce n'était pas très bien vu, c'est là justement qu'on voit les rapports avec la voiture.

Est-ce qu'Alain Prost s'est fait retirer le permis?
C'est curieux, je ne me rappelle pas... A l'époque de Saint-Chamond... Il me semble qu'une fois, je me le suis fait retirer. Pour quoi? Pour excès de vitesse.

Vous roulez vite?
Ah non, non! Je ne roule pas vite, je fais vraiment très gaffe. Quand sur l'autoroute je me fais doubler à 120 sous des trombes d'eau par des automobilistes qui ne savent peut-être même pas ce qu'est l'aquaplaning, qui n'ont aucune sensation dans le volant... Ces gens-là, qu'ils roulent à 90 ou à 150, ça ne changera rien.

Vous avez un fort sentiment de propriété? Votre voiture, si on vous l'érafle...
Je m'en rappellerai toute ma vie... Nous, les pilotes, on a tous eu des deals très intéressants avec Mercedes. Ma première, je l'ai achetée en 1980, c'était ma première année de Formule 1, et je l'avais laissée, neuve, à l'aéroport de Satolas. Je l'ai retrouvée absolument détruite, saccagée, l'intérieur découpé à coups de canif; bien entendu on m'avait piqué la radio. Vraiment, j'ai chialé comme un gosse devant la voiture, dix minutes. A cette époque, je faisais un peu de ball-trap et je venais d'aller chercher un fusil, je l'avais avec moi. Vraiment, ce jour-là, si j'avais vu... Ah! Je crois que j'aurais pu faire une connerie, tellement ça m'avait retourné. L'acte gratuit, le fait de saccager, alors que c'est ma propriété, payée avec mon argent, je n'accepte pas. Pas plus que le saccage en général, d'ailleurs.

Vous n'avez pas eu envie de garder la Martini de vos débuts?
Je n'ai pas une voiture de course! Si, je vais avoir la dernière voiture avec laquelle j'ai gagné le Championnat du monde, la Williams-Renault, que j'aurai dans six mois pour des raisons de confidentialité technique. C'est la seule que je voulais... A certains moments, je me dis: c'est un peu con... En tout cas, elle sera en état de marche. C'est possible que j'aille faire deux ou trois tours, comme ça.

Attention aux regrets!
Je ne sais pas si je le ferai. Je ferai peut-être traiter ça par Damon! (Il rit.)

Et le bruit d'un moteur vous y êtes sensible?
J'aime les gros moteurs. Pas très puissants, mais avec beaucoup de couple. Le moteur qu'on aime entendre au moment où on démarre et qui donne surtout un maximum de souplesse. Si on pouvait avoir un couple énorme, avec une puissance maxi, qui nous emmène à 150, 180, ,pas plus, ce serait bien, plutôt que d'avoir à conduire des voitures très nerveuses, qui montent à 250, un peu pointues... Ah! Le moteur! Au-dessous du six cylindres... Un bon huit cylindres, quand même, c'est sympa.

C'est le pilote qui parle ou le mécanicien des débuts, ou l'amoureux de l'automobile?
Je suis purement un amoureux de l'automobile, sans ressembler pour cela aux collectionneurs. Je vois comme ils sont, je les trouve absolument fascinants, mais j'ai l'impression qu'ils ne pensent qu'à ça. Moi, par rapport à un collectionneur, j'adore la voiture en général, de manière peut-être plus large. Il y a des voiture qui ne paient pas de mine et, tiens, qui sont sympa dans une utilisation donnée. Aujourd'hui, sur le marche, il y a une voiture qui me plaît: la Bentley décapotable, vert anglais, une beauté, j'adore. Je serais autant à genoux devant une voiture comme ça que devant une Bugatti. Cela dit, je n'achèterai jamais de ma vie une voiture à ce prix-là. C'est presque une position morale. Mais peut-être que dans vingt ans je changerai.

Si la voiture c'est la liberté, l'important c'est la liberté de choix?
Voilà. Je suis pour qu'il y ait des voitures de sport, des grosses voitures, des voitures qui fassent rêver. A mon avis, la Rolls représente toujours le mythe, l'idée même du luxe.

Comment voyez-vous l'évolution de l'automobile?
Les analystes n'ont pas un travail facile. Dans aucun domaine, automobile, financier, culturel, politique... L'Espace, personne n'en voulait. Et c'est une voiture qui a révolutionné, qui révolutionne encore non seulement le marché, le paysage économique, mais l'idée qu'on se fait, qu'on va peut-être se faire de l'automobile. Moi, j'en ai une et je l'adore. Mon fils de quatre ans, on le met derrière, il aime parce qu'il voit absolument tout. En automobile, on n'a longtemps pensé qu'au conducteur, on commence seulement à penser aux passagers. Mais savoir ce que sera l'automobile en général dans dix ans, je crois que c'est impossible.

Dans cette évolution, quelle est votre possibilité d'intervention?
Je viens de faire une très, très belle expérience en visitant tous les départements qui construisent une voiture de A à Z. Et je me suis aperçu qu'il y avait des gens extrêmement brillants. J'étais vraiment de ceux qui les sous-estimaient. La F1, c'est tellement le top qu'on a tendance à penser que, derrière, hein... En F1, on travaille pratiquement sans contraintes, sinon celles de la course d'après. Celui qui conçoit une voiture de série, qu'est-ce qu'il a dans le cahier des charges? D'abord le temps, il faut cinq ans. Il faut tenir compte des analyses sociologiques, des modes, du concurrent. Il ne fait jamais ce qu'il veut. Moi, ce n'est pas parce que j'ai travaillé pendant vingt ans dans la course automobile que je peux arriver dans ce milieu et... Non, je peux trouver ma place, en valeur ajoutée. C'est sûr, ça me plairait.

L'automobile va être de plus en plus confrontée aux urgences de l'écologie. La voiture électrique est-elle une solution?
Je pense que les voitures électriques en ville, ça pourrait être plus tôt qu'on ne le croit. C'est une question de volonté! Et il faudra bien trouver une solution à la pollution... En revanche, le côté pratique ne paraît pas très évident. Et il y a l'idée de liberté, celle de propriété, qui vont peut-être s'arrêter si on impose un type de voiture aux habitants des villes. C'est peut-être un moyen de lutter contre la désertification des campagnes! (il rit). Je crains aussi certaines décisions politiques, démagogiques ou utopiques. En Suisse, par exemple, on doit normalement couper son moteur aux feux, pour des questions de pollution. Or, on sait très bien que, pour bien fonctionner, un catalyseur doit être chaud!

Contentons-nous alors d'autres systèmes. Le guidage par exemple.
On va aller vers un maximum d'automatisation. Des procédés comme le guidage, c'est génial. Mais il ne faut pas tomber dans l'excès inverse. Surtout qu'il ne soit pas nécessaire d'être ingénieur pour conduire la voiture de demain! L'automobile de demain, je la vois comme ça: apporter aux gens de la sécurité, de la convivialité... Que soient résolus des problèmes apparemment simples: je fais du vélo comme un million de personnes. Ce vélo, je le mets dans le coffre, ou même derrière, On doit pouvoir trouver un système plus évident!

Quand vous étiez enfant, vous imaginiez la voiture du XXIe siècle entièrement automatisée, presque autonome?
Pas du tout! Je ne pensais qu'à aller vite, très vite. Quand j'avais dix, quinze ans, je pensais que la voiture de l'an 2000 roulerait à 300 à l'heure. Pour tout le monde!

Comme la voiture de Spirou et Fantasio, cette BD de la fin des années cinquante?
Une véritable fusée!

Faites-vous très attention au matériel?
Ah oui! Ç'a été ma réputation pendant des années. Je n'aime pas casser en général, surtout ce qui es mécanique évidemment. En compétition, on est là pour aller au max, alors on s'en fout. Mais moi, quand je cassais, une boîte ou un moteur, ça me faisait mal au cœur. Une douleur physique. Abîmer la voiture en plus, sur une bordure ou dans un tête-à-queue... Même le fait qu'elle soit sale, aah...! J'étais plus vexé, de façon absolument tragique, par le fait que ma voiture soit abîmée que par la sortie de route.

Quelles voitures aimeriez-vous posséder aujourd'hui?
La Bentley. Sûr. Je ne sais pas si j'aurais une voiture de sport. Peut-être la Chrysler Viper pour le look. Quelques américaines. Et d'autres, parce que j'aime la voiture. Quand je prends une voiture de fonction, une voiture neuve, c'est toujours un bonheur, toujours le même plaisir.

La voiture n'est plus cet objet spécifiquement masculin...
&199;a a basculé. D'une manière normale: évolution de la société, évolution du produit automobile. Je pense aussi que le regard des femmes sur le propriétaire d'une automobile a changé, et je pense que c'est très important. Aujourd'hui, ce serait plutôt pour le dénigrer que pour l'admirer... Il faut être dans une certaine norme et que la voiture corresponde au style et au caractère. Cela dit, je pense à la Twingo qui a amené peut-être un style justement. On nous avait dit: il ne faut surtout pas qu'elle dépasse un certain prix. Or, aujourd'hui, il y a énormément de Twingo à 80'000 F dans Paris! La preuve qu'on peut se tromper, qu'on attend d'une voiture des surprises et qu'on peut y ajouter du sens. Et il y aura toujours un côté jalousie. Celui qui a une Twingo, même s'il a payé 30'000 francs de plus pour les options, ça reste une Twingo. Alors que s'il a une voiture un peu plus en vue, même si elle vaut le même prix, il se sentira moins à l'aise. Le plaisir actuel, c'est que la voiture ne soit plus du tout un souci.

Quand vous conduisez, vous êtes un râleur?
Moi qui passe pour un râleur, je ne dis pas un mot au volant. Les gens me font peur, j'ai l'impression qu'ils pourraient faire n'importe quoi. Les femmes sont très agressives, les hommes sont dangereux. S'engueuler avec un type un soir en ville? Je crains toujours qu'il sorte un couteau. Alors j'y vais mollo.

Une forme de contrainte supplémentaire...
Mais le phénomène automobile a une force absolument incroyable si l'on considère les contraintes qu'il a! Par rapport à la voiture, on vit une époque où on est tous complètement maso! Ça veut dire que le phénomène automobile est permanent, qu'il existe comme manger, boire, dormir... Toutes ces contraintes depuis vingt ans, ces augmentations de l'essence, allez tiens vingt centimes d'un coup!

Il y a quand même des contraintes positives: la sécurité...
C'est très complexe. On fait déjà des choses super. Mais on ne peut pas tout faire parce qu'il y a des concurrents, etc. En règle générale, la sécurité est un point qu'on peut beaucoup améliorer sur les voitures actuelles. Il faudrait éviter dans ce domaine-là des situations de concurrence. Je considère que les politiques ne font pas le maximum pour la sécurité. Vraiment, décisions européennes et mondiales sont nécessaires.

Au fait, aimez-vous les salons?
J'adore les salons. En principe, je fais chaque année un salon auto, un salon moto, un salon bateau et si possible un salon avion. Parce que c'est quand même là qu'on rêve le plus. Parce qu'on voit les voitures, même si elles ne sont pas en mouvement, au moins on n'est pas déçus! Le salon représente un truc fantastique, tout est bien, tout est nickel, il y a la foule, comme une famille, les hôtesses, les vendeurs... C'est magique.

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Entretien réalise par
Olivier Margot
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